BENZOCARE

La consommation des benzodiazépines et d’apparentés (une classe de médicaments psychoactifs qui englobe les sédatifs, les anxiolytiques et les hypnotiques, ci-après dénommée BZD/Z) est élevée en Belgique. En 2018, 12% des belges prennent des BZD/Z. Dès que le traitement dépasse la durée recommandée de 2 à 4 semaines, le rapport risque/bénéfice est très discutable. En Belgique, 1 utilisateur sur 3 qui commence les BZD/Z prend encore ces médicaments 8 ans après. Une consommation régulière à long terme n’est pas recommandée en raison des effets indésirables tels que la tolérance, la dépendance physiologique et psychologique, les symptômes de sevrage, même lorsqu’ils sont utilisés à des doses faibles et constantes. Finalement, les effets d’une consommation régulière de BZD/Z peuvent être difficiles à différencier des symptômes initiaux. Dans l’ensemble, les BZD/Z présentent un potentiel élevé de dépendance. Alors que de nombreuses personnes développent une dépendance à faible dose, d’autres développent une dépendance à forte dose. Cette dernière est souvent un problème complexe, associée à une comorbidité avec des troubles mentaux graves ou à un double diagnostic et parfois à une polytoxicomanie. Elle s’accompagne souvent de multiples besoins de soins non résolus en santé mentale.

Jusqu’à présent en Belgique, la plupart des recherches se sont concentrées sur la dépendance à de faibles doses et sur l’arrêt progressif du traitement, réalisé dans le cadre des soins primaires ou avec l’aide des pharmaciens d’officine. Cependant, les données internationales montrent que de nombreuses personnes dépendantes de fortes doses ne sont pas en mesure de parvenir à une abstinence à long terme par le biais de ces stratégies d’arrêt. Pour ceux-ci, des soins intégrés complets semblent plus efficaces.

En général, l’utilisation des structures de soins par les personnes souffrant d’un problème de santé mentale en Belgique est inférieure à la moyenne et une proportion importante de ceux qui cherchent de l’aide ne reçoivent pas de traitement efficace. Ceci met en évidence un manque dans la prise en charge dans le secteur de santé mentale. On ne sait toujours pas combien de personnes souffrant d’une dépendance ou d’une comorbidité liée aux BZD/Z et nécessitant un traitement, sont bien orientées dans les services de santé mentale, ni combien d’entre elles reçoivent un traitement efficace.

Il est important de combler cette lacune et de mettre en lumière a) la récente désinstitutionnalisation du secteur des soins de santé mentale, avec son passage d’une prise en charge en milieu hospitalier à un soutien communautaire et de proximité qui vise à garantir la continuité des soins et b) de l’intégration des soins d’assuétudes dans les soins de santé mentale depuis 2019.

En outre, la manière dont la dépendance aux BZD/Z est perçue par les professionnels de la santé mentale et des soins aux personnes dépendantes reste peu étudiée, tandis que l’on sait également peu de choses sur les expériences vécues par les personnes souffrants d’une dépendance liér aux BZD/Z accompagnée d’une ou de plusieurs maladies mentales concomitantes et qui sont traitées par des médicaments psychotropes ou dans des services de soins psychiatriques (contrairement aux autres substances illicites).

 

Notre équipe de recherche :

Melissa Ceuterick est une anthropologue médicale travaillant comme chercheuse postdoctorale à Hedera       au département de Sociologie de l’Université de Gand. Elle travaille en tant que chercheuse principale  dans le projet de recherche BENZONET (Perception, habitual use and cessation of BENZOdiazepines: a multi-method NETnography).

Beatrice Scholtes a étudié la Santé Publique Européenne à l’Université de Maastricht. Elle a défendu sa thèse de doctorat sur les politiques de santé concernant la prévention des blessures chez l’enfant en 2018 à cette même université dans le département de Santé Internationale. Au cours de sa carrière, elle a développé un intérêt marqué pour la recherche sur les services de santé et sur l’équité en matière de soins de santé. Elle se concentre sur les soins primaires et est co-directrice de l’unité de recherche Soins primaires et santé du Département de Médecine Générale de l’Université de Liège.

Piet Bracke est un sociologue de la santé lié au Département de Sociologie de l’Université de Gand. La santé mentale et les services de santé mentale sont au cœur de ses intérêts de recherche. Il est Professeur de sociologie à l’Université de Gand (2010), où il enseigne notamment des cours de spécialisation en sociologie de la santé et de la maladie. Il est également directeur de Hedera – Santé et recherche démographique – Université de Gand (2014).

Pauline Van Ngoc est arrivée au début de l’année 2021 au Département de Médecine Générale de l’Université de Liège après un Master en Psychologie Sociale et du Travail à Université de Liège. Avant son arrivée, elle a compilé différentes expériences professionnelles dans des associations wallonnes et une année de recherche au Département de Santé Publique de l’ULiège.

Jean-Luc Belche est Professeur au Département de Médecine Générale de l’Université de Liège et Médecin généraliste à Liège. Ses recherches portent sur la communication dans les soins de santé, la coordination des soins, les soins intégrés et la collaboration interprofessionnelle.